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Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

Le gouvernement vient une fois de plus de reconduire à l’état d’urgence pour une durée de 4 mois. Certes, la situation sanitaire appelle une mobilisation de tous les pouvoirs publics, mais l’état d’urgence est un régime qui déroge au fonctionnement de nos institutions, et notamment qui court-circuite le Parlement.Le recours systématique depuis 2015 à ce régime d’exception dès qu’une difficulté se présent constitue une menace pour notre démocratie. Il est inefficace, car il empêche la critique et la proposition qui sont indispensables pour progresser collectivement et aujourd’hui pour lutter contre la pandémie.J’ai ce week-end voté contre cette prorogation de 4 mois.

Le texte de mon intervention

Le covid-19 est bien sûr un immense défi sanitaire, d’une complexité qui doit tous nous conduire à l’esprit de responsabilité comme à la plus grande humilité. Mais cette crise est aussi une formidable interpellation pour nos sociétés, les gouvernements et pour nous ici même. Cette crise nous interpelle d’abord parce qu’elle a soudain conduit le pays à remercier ceux qui, depuis trop longtemps, faisaient l’objet d’un tel mépris : ceux « qui ne sont rien » et qui pourtant ont permis au pays de tenir. Quel défi que de nous assurer qu’à l’avenir, ils aient le droit à plus que de simples applaudissements !

Cette crise nous interpelle également parce qu’alors qu’on ne parlait plus que marché, dérégulation et start-up, ce sont les services publics, l’hôpital, les pompiers, les ouvriers et les employés qui ont montré leur efficacité pour affronter le pire. Quel défi, de rebâtir nos services publics après tant d’années de réduction organisée de leur périmètre comme de leurs moyens matériels et humains !

La crise nous interpelle encore parce qu’elle remet au centre le besoin de débattre, d’évaluer collectivement les besoins et les arguments des uns et des autres, ceux des scientifiques, ceux des élus mais aussi ceux des salariés, des enseignants, des syndicalistes. Quel défi pour la représentation nationale d’être à nouveau guidée par l’intelligence collective au service de la souveraineté populaire plutôt que par le gouvernement des experts !

Or que nous demandez-vous avec la prorogation pour quatre mois de l’état d’urgence sanitaire ? Précisément le contraire. Vous faites une fois de plus le choix d’un régime d’état d’urgence dérogatoire au droit commun : vous demandez au Parlement un blanc-seing ; vous lui demandez de ne plus jouer son rôle, celui de contrôler, d’évaluer, de critiquer les choix du Gouvernement et celui de proposer.

C’est la critique indissociable de la proposition, nourrie des témoignages, dans nos territoires, des soignants, des enseignants, des commerçants, des salariés, qui nous ont permis de progresser dans la lutte contre le covid-19. C’est la critique qui a permis que les masques, réputés inutiles, deviennent indispensables. C’est la critique qui a permis que les tests soient généralisés. C’est la critique qui a permis que les soignants voient leur salaire réévalué. C’est également la critique qui a permis que l’hôpital, au bord de l’asphyxie, soit à nouveau doté, même s’il reste beaucoup à faire.

Vous le savez, les députés communistes ont souvent alerté sur le risque d’accoutumance au régime d’exception qui court-circuite nos institutions les plus essentielles. Ce n’est désormais plus seulement un risque mais un authentique défi pour notre démocratie car, depuis 2015, nous avons vécu sous ce régime dérogatoire de l’urgence près de la moitié du temps. Que disons-nous, chers collègues, de nos institutions en recourant sans cesse à ce régime d’exception sinon que nous les jugeons inaptes à appréhender les grands défis auxquels nous sommes confrontés ? Qu’il s’agisse du réchauffement climatique, du terrorisme, des crises économiques et sociales, des pandémies à venir et de tout ce qui constitue désormais le quotidien de notre commune humanité, que disons-nous, sinon que le temps démocratique n’est plus qu’une parenthèse réservée aux petites brises, qu’il faudrait vite refermer pour affronter les avis de tempête.

N’entendez-vous pas cette petite musique selon laquelle, finalement, ce seraient les régimes les plus autoritaires qui s’en sortiraient le mieux et que les démocraties, engluées dans leurs débats, seraient, elles, impuissantes ? C’est ce même air populiste que vous avez entonné, ici même, monsieur le ministre, en demandant aux députés de sortir.

Chers collègues, les députés communistes ne sortiront pas et ils ne voteront pas ce texte. Nous sommes convaincus que le débat et la démocratie sont la condition pour que les appels à l’unité nationale, à laquelle nous sommes prêts, aient un véritable sens.

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