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Loi sur l’accélération et la simplification de l’action publique (ASAP)

Mon intervention lors de la discussion générale sur le projet de loi sur l’accélération et la simplification de l’action publique (ASAP), une loi fourre-tout qui va encore un peu plus déréguler au détriment de la transparence et de la démocratie.

Monsieur le président,

Madame la ministre,

Chers collègues,

Nous allons débattre cet après-midi d’éolien, de certificat médical, de prélèvement de la ressource en eau, d’assurances, de permis de conduire, de l’Office National des Forêts. Quel florilège !

Vous nous aviez promis de la simplification au service des citoyens, vous nous livrez un bijou de complexité, un mille-feuille de mesures apparemment anodines pour faire nous avaler tout rond des réformes qui auraient mérité de vrais débats. C’est le cas de la réforme de l’ONF, mais aussi des évaluations environnementales ou encore de l’information et la participation du public.

Il est savoureux de voir qu’alors même que cette majorité ne cache pas sa volonté de limiter le droit d’amendement des députés – encore une fausse bonne idée sous couvert de simplification et d’efficacité d’ailleurs – ce sont plus de 50 amendements qui ont été déposés par le Gouvernement sur son propre projet de loi. Belle conception de la démocratie représentative : sous les oripeaux de la démocratie, la main du pouvoir est d’autant plus ferme qu’il est lui-même vacillant.

Et disons-le, alors que la situation sanitaire se dégrade de jour en jour et nourrit des inquiétudes légitimes, comment ne pas s’interroger sur l’aubaine de faire passer presqu’en catimini, un nouveau train de mesures rétrogrades pour l’environnement et la démocratie.

Mais revenons-en au coeur du sujet :« Accélérer et simplifier l’action publique ». Quel programme !

Mais de quelle action parle-t-on, et surtout de quelle simplification ?

S’agit-il de faciliter l’accès des citoyens les plus fragiles à leurs droits ? En finir avec les lourdeurs des démarches administratives qui les tiennent éloignés des aides auxquelles ils ont droit ?

S’agit-il d’aider les petites entreprises en galère à bénéficier plus rapidement de mesures d’accompagnement souvent accaparées par les multinationales, aux aguets de tous les dispositifs d’exonération qui leur épargnerait la peine de cotiser à la sécurité sociale et d’acquitter l’impôt, parfois jusqu’à la fraude -fraude qui vous passe d’ailleurs sous le nez, bien trop occupés que vous êtes à traquer le malheureux qui aura manqué la mise à jour de sa situation à la CAF ?

Bien sûr que non !

C’est même exactement le contraire. La seule chose que ce texte accélère, c’est votre entreprise de dérégulation et d’affaiblissement de l’État, au profit des intérêts financiers.

La Covid-19 a bon dos ! Moins d’État, moins d’action publique, moins de contrôle, moins de protection, moins de droits, moins de tout. La faute au coronavirus !

Vous ferez bien au passage quelques économies, mais qui ne régleront en rien les problématiques budgétaires que nous affrontons et mettront en péril des équilibres déjà fragiles. Par contre, notre démocratie et nos services publics le paieront au prix fort.

Car enfin, quel signal envoyez-vous aux entreprises quand vous leur dites qu’elles peuvent commencer certains travaux avant que toutes les autorisations ne soient délivrées ?

Quel signal envoyez aux citoyens quand vous leur dites qu’on va délivrer des autorisations d’installation de parcs éoliens en mer avant même que la consultation du public soit terminée ?

Est-ce cela le nouveau monde, est-ce cela votre démocratie 2.0 ?

Alors-même que dans l’esprit de tant de nos concitoyens, la confiance en la parole publique est entamée, celle dans nos institutions abîmée, vous enfoncez le clou.

Devant les caméras, Jupiter fanfaronne et donne au monde entier des leçons de démocratie.

Mais derrière, dans la pénombre des commissions, que fait-on ? On revient en douce sur le droit des citoyens d’être entendus sur des projets qui font peser des risques sur leur santé et leur environnement.

Vous allez même jusqu’à profiter d’un amendement des collègues normands, de votre majorité qui plus est, échaudés par le terrible accident de Lubrizol, et qui réclament plus de transparence, pour renforcer…le droit au secret des affaires ! Il fallait y penser !

Soyons clairs, loin de sécuriser les porteurs de projets, les mesures que vous proposez vont alimenter les tensions entre les intérêts des industriels et les préoccupations de la population.

Madame la ministre, avec mes collègues de la Gauche démocrate et républicaine nous ne sommes pas les ennemis de la lisibilité et de la simplification des procédures au service des citoyens et des entreprises.

Mais l’accélération ne peut pas servir de prétexte à la fuite en avant.

La simplification ne peut conduire à la suppression de toute règle.

Et l’efficience ne saurait être obtenue par la dérégulation folle et le dépeçage permanent de nos services publics.

Car alors, en place du nouveau monde que vous nous promettez, c’est bien l’ancien qui surgirait, celui où la force n’est pas à la Loi, mais à l’arbitraire. Ce n’est pas ainsi que nous saurons conjuguer la vie économique des territoires et nos objectifs en termes de santé et de protection de l’environnement.

Vous le savez, les députés de la gauche démocrate s’inscrivent toujours en force de proposition. Nous défendrons une soixantaine d’amendements sur ce texte notamment pour lutter contre l’ensemble des régressions en matière de droit de l’environnement.

De leur sort dépendra notre position finale. Je vous remercie.

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